Nous sommes en 1997, et lorsque je m’apprêtais à lancer la petite “Demo 1” sur ma PlayStation 1, je ne savais pas encore que j’étais sur le point de découvrir l’un des univers vidéoludiques le plus exceptionnel et mémorable de ma génération. Le fait est que plus de vingt ans plus tard l’univers d’Oddworld suscite toujours plus d’engouement tant chez ses admirateurs de la première heure, que parmi les nouvelles générations avec les derniers nés de la franchise à savoir Oddworld : New’n’Tasty et prochainement sur PlayStation 5 Oddworld : Soulstorm. Mais pour l’heure, revenons à nos fondamentaux et prenons le temps d’honorer l’Odyssée d’Abe.
L’Odyssée d’Abe, un univers intemporel
Si l’Odyssée d’Abe fut une expérience inoubliable pour beaucoup d’entre nous, cela s’explique de prime abord par l’originalité et le charme insondable de son univers. En vingt ans, les doigts de mes deux mains suffisent à compter les univers de cette trempe, à la fois intemporels, magiques, inspirants, et beaux.
Et ce n’est pas la cinématique d’introduction qui me fera mentir, avec son ton grave et dystopique dévoilant l’une des séquences les plus cultes du jeu vidéo. En quelques secondes, voilà que nous sommes arrachés de notre siège, pris par le col et abandonnés dans les arcanes d’Oddworld avec la découverte de l’usine Rupture Farm.
Voici comment nous est présenté Rupture Farm durant la magnifique cinématique d’introduction. Il semblerait que les syndicats n’aient pas encore mis leur nez ici.
Nous incarnons Abe, un héros et simple agent d’entretien appartenant au peuple des Mudokons, réduit en quasi-esclavage par leurs maîtres et employeurs les Glukkons. Ce sont ces derniers qui demeurent à la tête de Rupture Farm, une usine à viande peu scrupuleuse sur ses méthodes et responsable de la disparition de nombreuses espèces endémiques dans l’univers d’Oddworld. Mais un jour, la matière première faisant défaut, les Glukkons décidèrent de condamner leur propre main d’œuvre, en les sacrifiant comme simple amuse-gueule ! Cette découverte tant glauque que loufoque marque le début de l’Odyssée d’Abe, odyssée de l’usine Rupture Farm, à la découverte de contrées mystiques et, si possible, en libérant sur notre chemin les membres de notre peuple !
Les Mudokons sont au menu… Effectivement, il va falloir partir !
Oddworld : L’Odyssée d’Abe, une épopée entre terre sacrée et usine à viande
Comme première impression, le jeu est beau. Vraiment beau, et force est de constater que plus de vingt ans plus tard les graphismes n’ont rien perdu de leur superbe au point de faire pâlir un paquet de productions actuelles. Peut-être, ce grain si particulier propre aux années 1990, suffisamment propre pour être apprécié, mais trop sale pour être réaliste, est-il responsable de la fascination émanant des graphismes si particuliers d’Oddworld.
Attention, chute de carcasses ! Rupture Farm est légèrement glauque.
La bande-son n’est pas en reste et accompagne à merveille les paysages si particuliers d’Oddworld, souvent discrète, elle fait partie intégrante de l’atmosphère désolée qui s’en dégage. Bien souvent, elle sait s’effacer, nous laissant apprécier le son du vent ou celui d’une créature inconnue, ou quelques borborygmes d’instruments traditionnels. Le bruit du vent laisse place au silence pour mieux apprécier les différentes atmosphères. La musique d’Oddworld est symbiotique avec les graphismes qu’elle illustre. Musique et graphismes ne font qu’un dans Oddworld, et leur alchimie est pour grande responsable de l’aura indescriptible qui entoure l’univers d’Oddworld. Et à ce niveau, il est indispensable de jouer à Abe pour comprendre ce que je formule ! Oddworld : L’Odyssée d’Abe possède un tel caractère, que la simple chaleur de la première note de synthétiseur au lancement du jeu est reconnaissable parmi toutes autres.
L’OST D’Oddworld : L’Odyssée d’Abe
Oddworld est magnifique. Chaque environnement propose des thématiques inoubliables. Ici, les alentours de Rupture Farm pendant l’exfiltration d’Abe.
Une faune et une flore impitoyable
Oddworld est un univers fondamentalement hostile. Je me souviens même d’une certaine appréhension lors de mes premières parties. Tout est prétexte à vous transformer en charpie ! Pendant votre odyssée, des centaines de dangers viendront mettre vos nerfs à rude épreuve. Car, si une trame de fond alerte sur l’importance de l’écologie, le studio ne semble pas oublier à quel point la nature peut être aussi belle qu’elle est cruelle. Abe devra échapper aux colossales Scrabbs et apprivoiser des Paramites au comportement tant complexe que vicieux, toutes deux demeurant des créatures à la fois sacrées et terriblement dangereuses.
Des environnements aussi marquants que passionnants. En haut, le temple Scrabanien vous en fera baver et, en bas, Paramonia infesté de vicieuses Paramites qu’il faudra appâter avec de la viande.
Les passages dans les territoires sauvages sont grandioses. Avant que Rupture Farm ne les transforme en viande, les Scrabs et les Paramites étaient avant tout des créatures sacrées.
Alors que les dédales de Rupture Farms ressemblent davantage à un complexe de torture.
Du côté de l’usine Rupture Farm et de ses environs, il faudra jouer des coudes avec des gardes armés de fusils mitrailleurs connus sous le terme de Sligs, désarmer des mines, fuir les gueules acérées des voraces Slogs, sortes de chiens mutants semblant tout droit sortis d’un film de John Carpenter. Pas simple, et ceci explique pourquoi Oddworld : L’Odyssée d’Abe est encore aujourd’hui réputée comme un jeu exigeant. Et si ce n’est pas suffisant, durant toute votre aventure, il sera possible de sauver sur votre passage quatre-vingt-dix-neuf Mudokons des griffes des Glukkons. Mais attention, bien souvent, les exfiltrer corsera grandement votre mission, tant certains sont dans le pétrin !
Sauver les quatre-vingt-dix-neuf Mudokons ne sera pas aisé. Il faudra les évacuer à travers des portails de chauves-souris, et dès cinquante évasions, vous accédez à la bonne fin !
Voilà une petite photo de famille. À gauche, Abe chevauchant Elum, juste en dessous une Paramite, tout à droite un Scrab, et au milieu en costume les Glukkons avec leur air de Balkany !
Des mécaniques de jeu complexes et une intelligence artificielle
Vous l’avez déjà compris, mais Oddworld : L’Odyssée d’Abe demeure déjà un ovni et ne fait rien comme tout le monde, jusque dans son gameplay. Si comme dans les meilleurs jeux de plateforme, il est possible de courir, sauter, s’accrocher, ou encore rouler, Abe est aussi capable d’envoûter ses ennemis et de communiquer avec ses congénères. Salut ! Suis-moi ! OK ! Attends ! Au boulot ! Des répliques mythiques pour tous les amateurs d’Oddworld, qui font partie des actions indispensables pour guider les autres Mudokons en sécurités hors de Rupture Farm. À l’époque, ces fonctions étaient de petites révolutions, car nécessitant une intelligence artificielle développée. Pour cette raison, il faudra parfois apprivoiser le comportement de nombreux ennemis, et analyser leurs réactions pour avancer dans l’histoire sans autres indications !
L’une des choses à savoir sur l’intelligence artificielle des Scrabs : ils ne peuvent pas cohabiter ! Utilisez cet avantage.
Car ce qui fait le sel et l’originalité d’Abe, c’est bien cette vulnérabilité peu ordinaire pour un jeu de plate-forme. Abe ne saute pas sur la tête de ses ennemis pour avancer ! Il faudra la jouer fine, courir, se tapir dans l’ombre, s’infiltrer, s’exfiltrer, car Abe est bien doué de pouvoir d’envoûtement certes, mais frontalement, il sera bien incapable de lutter face à ses adversaires d’autant plus redoutables.
Il est possible d’envoûter certains adversaires pour les retourner contre eux-mêmes, ici un Slig ! Mais parfois, certains radars vous empêcheront tout simplement d’user de cette technique…